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La société anarchiste en scène : au présent et au futur.- Les utopistes de La Clairière de Lucien Descaves et Maurice Donnay

II. La société anarchiste en scène : au présent et au futur

En effet, les utopies anarchistes entretiennent toujours un lien étroit avec l’histoire. C’est pourquoi elles sont proches de l’expérimentation. Or, quel lieu pouvait mieux convenir au tableau d’une société libertaire que le théâtre ?

L’utopie se présente comme une théâtralisation du problème politique. C’est pourquoi Alain Pessin utilise la métaphore théâtrale pour présenter la convention utopique [1]. Le théâtre est justement ce terrain d’une expérimentation, qui expose des directions potentielles, des attitudes et des conduites signalées comme fictives mais qui pourraient trouver à s’incarner. Comme il ne se présente pas sous forme interrogative, il est déjà lui-même un travail d’incarnation, d’incorporation des conduites. Il n’est donc pas étonnant que le théâtre ait été choisi pour donner à voir une « utopie » (en est-ce seulement une ?) de tendance libertaire, imaginée par Lucien Descaves et Maurice Donnay. Antoine l’a mise en scène.

A. Les utopistes de La Clairière de Lucien Descaves et Maurice Donnay

Nous avons vu [2] que beaucoup de pièces, comme celles d’André Veidaux ou de Vera Starkoff, nous parlent de la destruction de la société actuelle, et se terminent sur l’espoir d’un autre monde. Mais d’autres vont plus loin, du côté de l’utopie, en mettant en scène des pratiques proprement libertaires. Le théâtre alors permet l’expérimentation : dans La Clairière, les auteurs instaurent une situation utopique (qui ne trouve pas son équivalent dans la réalité), pour la voir fonctionner et se dégrader. Le théâtre va jusqu’au bout d’une idée pour en tirer des conclusions.

La Clairière  [3] a été écrite en 1900 par Lucien Descaves en collaboration avec Maurice Donnay [4]. La pièce met en scène une colonie communiste-anarchiste, les difficultés auxquelles elles se heurte. Il ne s’agit donc nullement d’une « utopie » littéraire, mais la référence à l’utopie est constante dans la pièce : il s’agit bien, pour les personnages, d’expérimenter « une vie nouvelle, basée sur la production sans salaire, l’échange sans estimation et la consommation sans argent » [5].

L’intrigue est d’abord centrée sur le personnage du docteur Alleyras, rejeté par la bonne société de la ville de province dans laquelle il vit qui ne lui pardonne pas de vivre en union libre (après son divorce), de donner des soins gratuits, de ne pas s’occuper de politique (c’est-à-dire qu’il refuse de devenir député). Il s’agit donc d’un personnage persécuté, mal intégré à son milieu d’origine. Son métier l’appelle souvent à « La Clairière », une ferme où une petite colonie applique les théories néo-communistes. Là vivent en marge une vingtaine de personnes qui produisent elles-mêmes ce dont elles ont besoin en mettant en commun leur travail. Comme les persécutions vont croissantes, le docteur et sa compagne décident d’aller rejoindre la communauté anarcho-communiste (acte III). Ils verront qu’il est certes plus difficile d’aimer les habitants de la Clairière « de près », mais rien ne saurait remplacer leur participation à cette expérience de vie nouvelle.

L’intrigue est donc, au départ, basée sur l’itinéraire du docteur, et pourtant le personnage s’efface vite devant la petite communauté, véritable sujet de la pièce. Comment s’est fondée la colonie ? Le spectateur apprend que tout a commencé par un encart dans le journal annonçant l’établissement d’une colonie communiste en France. Nous n’en savons pas plus sur l’origine et les motivations des compagnons. La colonie a bénéficié de l’argent d’un capitaliste repenti, à qui Rouffieu, l’ouvrier tailleur fondateur de la colonie, avait fait part de son projet :

« J’exposai alors le plan d’une vie nouvelle, basée sur la production sans salaire, l’échange sans estimation et la consommation sans argent ; j’envisageai un état social d’où seraient éliminés progressivement le principe autoritaire, le droit de propriété, les intermédiaires et la monnaie, chacun retirant de la communauté ce qui est nécessaire à la satisfaction de ses besoins et demeurant seul juge de ce qu’il doit faire pour s’acquitter envers elle, c’est-à-dire envers tous » [6].

On a là « l’utopie » d’une société communiste-anarchiste, vivant en marge de l’État et sans hiérarchie. Grâce à la curiosité du philanthrope, sceptique et amusé, qui procure les fonds nécessaires à l’installation de la communauté, l’expérience a pu débuter. Notons l’ambiguïté inhérente à l’entreprise (et ce qui fait tout son intérêt) : elle voit le jour au sein du système capitaliste et grâce à l’argent d’un capitaliste repenti. Le philanthrope, en quelque sorte, procure aux participants de l’argent en échange d’un peu de divertissement : piqué par la curiosité, il les accule à la démonstration.

Les auteurs de la pièce nous montrent donc comment fonctionne, au quotidien, une communauté communiste-anarchiste. En fait, le programme de Rouffieu n’est rien d’autre que l’application de la formule de l’Internationale : l’émancipation des travailleurs par eux-mêmes. L’inspiration de la colonie est nettement libertaire : comme le rappelle Collonges, l’ouvrier ébéniste, en dessinant des buffets pour les ménages de la colonie et s’appliquant à les varier : « Il ne faut pas confondre Égalité avec Casernement » [7]. Il n’y a pas de chef à La Clairière, même si en pratique Rouffieu s’impose comme arbitre dans les discussions. Les décisions se prennent lors de réunions publiques, qui se tiennent le soir, appelées conseils de famille, dans lesquelles toute la communauté est présente. L’éducation est mixte, à la fois manuelle et intellectuelle, elle se fait le plus souvent dans la nature, en plein air, suivant en cela les indications données par Élisée Reclus, pour qui il n’y a d’école que « buissonnière », mixte, libre [8]. L’école est, dans la pièce de Descaves et Donnay, un lieu ouvert : elle fait corps avec la société tout entière au point de s’y dissoudre en tant qu’institution.

La Clairière est donc bien une sorte de colonie anarchiste expérimentale. Son nom est justifié, comme le remarque le docteur en s’y rendant :

« C’est bien en effet une clairière dans la forêt des lois, des conventions et des servitudes où nous sommes égarés » [9].

La Clairière ou comment vivre l’utopie au jour le jour

Cependant, si la colonie peut constituer pour beaucoup un « refuge » (elle est un asile pour tous ceux et toutes celles qui refusent de vivre dans la société contemporaine), elle n’est en aucun cas une utopie, un non-lieu, un espace situé dans un ailleurs lointain : les personnages sont des combattants, qui ont choisi de se regrouper à La Clairière mais sans pour autant renoncer à transformer la société. Ils ont d’ailleurs des relations incessantes avec leurs voisins. Ce n’est pas impunément qu’ils ont choisi de s’installer en France, près d’une petite ville de province : par ce geste, ils signifient qu’ils entendent bien bénéficier de tous les avantages de la civilisation, et que toutes les conquêtes de la science et du travail constituent un héritage social dont ils demandent leur part. La première personne à rejoindre la colonie, Hélène, entre à La Clairière non pour s’y retrancher du monde mais pour commencer la lutte. Cette institutrice, séduite par le fils du conseiller municipal, est désespérée lorsqu’elle se découvre enceinte, et pense d’abord à avorter ou à se suicider. Le docteur lui fait voir qu’elle n’a pas le droit de perdre deux vies et la pousse à rejoindre la colonie, approuvant son désir d’élever l’enfant contre son père :

« Laissons la résignation aux résignés. Au surplus, étant donné que la loi et partant la Société ne force pas le père à reconnaître son enfant, tant pis pour la Société si elle a plus tard, dans ce même enfant, un ennemi de plus, un révolté ! » [10]

Le choix de la colonie n’est en rien un refus du monde, c’est au contraire un choix militant, qui inaugure un projet de combat.

La pièce répond ainsi à l’une des grandes critiques faites aux libertaires à la fin du siècle : on leur reproche de s’abstraire de la société, de s’égarer en discussions théoriques qui n’ont aucune incidence sur les luttes sociales réelles. C’est cette critique que leur fait André Veidaux dans un article violemment intitulé « Médiocrité anarchiste » (paru dans Le Libertaire  [11]). Veidaux déplore ce qu’il appelle « la léthargie » de l’anarchisme, après « la période féconde de vulgarisation qui suivit le hautain exemple des propagandistes par le fait ». Tandis que les marxistes agissaient :

« Nous, nous avons parlé, parlé encore. Nous avons écrit, écrit encore. Nous continuons. Nous sommes des poètes, des artistes, des idéologues. Nous ne sommes point des hommes d’action ».

Ce qui entrave les anarchistes, selon lui, est le refus de se salir les mains. André Veidaux rejette les expériences communautaires anarchistes qui, se situant délibérément à l’écart de la société des autres travailleurs, s’interdisent par là-même toute action sur cette société :

« Sans doute, foin de la politique, foin des colonies dites anarchistes ! Pas de souillure politique, pas de colonisations extérieures à la société au milieu de laquelle nous vivons. Il ne faut pas s’abstraire du monde qu’on veut renouveler [...] ».

Les communistes de La Clairière semblent répondre à André Veidaux : s’il se mettent en marge de la société, autant que faire se peut, en vivant selon leurs propres principes, ils n’entendent aucunement s’exclure de cette même société. C’est d’ailleurs ce dont est bien conscient un autre personnage de la pièce, le politicien Verdier : sur le point de s’engager dans la bataille électorale, il se donne la peine d’aller voir les membres de la Clairière, espérant ainsi leur soutirer quelques votes... Peine perdue : ils ne sont pas inscrits sur les listes électorales ! Mais à Verdier qui leur reproche de ne pas remplir leurs devoirs de citoyens, Collonges répond : « Oh ! nous sommes reconnus d’utilité publique ! » [12] Leur marginalité choisie est une arme de combat, ils veulent ainsi faire de la propagande par l’exemple et prouver, par l’action, la véracité de leurs théories. Cette situation n’a évidemment rien de confortable, elle est extrêmement difficile à maintenir. Comme l’analyse Collonges, l’esprit critique, s’adressant à ses camarades :

« Oui, vous êtes vis-à-vis de la société que vous avez répudiée, dans la situation d’un divorcé condamnée à payer une pension alimentaire à son ancienne femme. Vous avez toutes les charges du mariage » [13].

Les deux auteurs s’appliquent en effet à montrer toutes les difficultés auxquelles se heurtent les membres de la communauté. Aucun problème n’est nié, aucune question n’est laissée de côté : là encore, l’expérimentation se distingue de l’utopie en ce qu’elle ne se présente pas comme une solution, mais au contraire, soulève plus d’interrogations qu’elle ne donne de réponse. Le spectateur découvre en effet progressivement que la vie dans la colonie n’a rien d’idyllique. La grande réussite des auteurs est d’avoir su montrer les difficultés auxquelles se heurtent les compagnons, d’une façon très concrète, à travers les petits heurts de la vie quotidienne. Ainsi, dès le début est-il fait mention d’un compagnon qui a tendance a boire (son défaut, « c’est la nostalgie du mastroquet » [14]). Le plus grave n’est d’ailleurs pas son ivrognerie, mais son besoin d’être puni pour parvenir à respecter certaines règles : la colonie n’a pas de police, les compagnons ne sont pas des enfants que l’on devrait surveiller. Que faire de celui qui ne sait se gouverner lui-même ?

La colonie compte bien sûr parmi ses membres le futur traître, celui qui ne parvient pas à s’acclimater à l’absence de lois : Testud. Ce personnage, cultivateur de son état, ne parvient pas à assumer la responsabilité de ses actes, et ne peut se faire à l’idée de vivre sans surveillance : aussi tient-il à se justifier constamment. Par ailleurs, les jalousies sont nombreuses, car personne ne compte les heures de travail qu’il effectue, et certains en profitent.

Lorsque le docteur et Jeanne vienne s’installer à la colonie, les haines redoublent. Les femmes du peuple se révèlent particulièrement mesquines et envieuses : elles jalousent les deux bourgeoises (Jeanne et l’institutrice Hélène) avec qui elles ne partagent rien. Mais comment en serait-il autrement ? Certes, le piano que le couple a installé dans la salle commune appartient à tous, mais en fait personne d’autre que Jeanne ne sait en jouer. D’où le découragement de Jeanne, qui elle aussi, pourtant vient du peuple :

« À quoi bon effacer l’inégalité des conditions, si ceux au profit desquels on la supprime, s’appliquent à la maintenir ? » [15]

La crise prend des proportions dangereuses avec la découverte d’une lettre de dénonciation, qui révèle que Collonges est en fait un réfractaire (il a déserté l’armée). C’est naturellement un amour déçu qui est à l’origine de la délation (la lettre a été écrite par une femme de la colonie, Adèle Rouffieu, rivale amoureuse déçue d’Hélène). Mais la jalousie d’Adèle n’est qu’un élément parmi d’autres qui expliquent l’échec de cette vie en commun.

Une des dernières scènes (à l’acte IV) présente les membres de la colonie au complet qui font leur autocritique. Il apparaît alors que tout le monde a quelque chose à se reprocher : Collonges a introduit le doute dans l’expérience communautaire, le docteur et Jeanne ont trop eu l’air de bienfaiteurs... On touche ici aux limites d’une telle entreprise : « on ne commande pas aux affinités » [16]. Même Rouffieu se remet en cause : il a oublié que l’homme ne vit pas seulement de pain.

« Quant à moi, si j’ai eu tort, c’est peut-être, dans l’organisation de la Société nouvelle que je rêvais, d’avoir attaché trop d’importance aux seules questions de production, de consommation et d’échange » [17].

Un des principaux intérêts de la pièce est donc de faire surgir les critiques de l’intérieur même de la colonie. La pièce se clôt sur la dissolution de la petite communauté anarcho-communiste, mais il reste un espoir que de telles expériences seront renouvelées.

L’ambiguïté de la conclusion ne pouvait que susciter des interprétations diverses dès la sortie de la pièce. La réception de la pièce est extrêmement variée : la pièce sera perçue comme une utopie, et critiquée ou non comme telle, en fonction des opinions politiques des critiques.

Les critiques de La Clairière : votre utopie n’est pas réalisable

D’une façon générale, la pièce est perçue comme une « utopie ». Le critique Armand Kahn, dans Le Théâtre social en France… [18] classe la pièce dans la catégorie « Le Prolétariat. La lutte des classes », mais conclue à l’impossibilité de réaliser une telle utopie. Analysant d’abord La Pâque socialiste de Veyrin, qu’il qualifie de « rêverie utopique d’un assoiffé d’idéal », il la compare ensuite avec La Clairière :

« Ceux de la Clairière aussi étaient réunis pour former comme une grande famille, en dehors des luttes sociales et des ennuis d’argent. Mais bientôt ils durent déchanter et, l’un tirant à droite, l’autre à gauche, ils ont dû se séparer. Le rêve n’était pas encore réalisable » [19].

La critique est intéressante : l’auteur condamne l’utopie sur scène, comme si le théâtre se devait, en vertu d’une règle non écrite, d’être réaliste. Cette approche qui privilégie les idées développées dans la pièce plutôt que sa forme et sa signification domine les critiques qui s’expriment lors de la première représentation de la pièce, le 6 avril 1900, au Théâtre Antoine.

À la sortie de la pièce, si la plupart des critiques s’accordent pour louer l’alliance surprenante des deux auteurs (Donnay vient du théâtre de boulevard, Descaves est plus connu comme auteur politique [20]), et faire l’éloge de la mise en scène d’Antoine et du talent des acteurs, les divergences portent sur le contenu idéologique de la pièce et sur le fait de savoir si l’utopie présentée est souhaitable ou non. La Clairière est-elle une pièce réactionnaire ou non : tel est l’enjeu des débats.

« On se demanda quels étaient son caractère, sa tendance, s’il y fallait voir une apologie ou un dénigrement du communisme. Elle était effectivement à double face, comme Janus ; elle changeait de signification selon le point de vue où on la considérait » [21],

écrit le critique Adolphe Brisson. Plus tard, lors de la reprise de la pièce (modifiée) en 1909, un journal mentionnera les craintes de Lucien Descaves :

« Même il sembla craindre que cette Clairière, dont nous suivions à ce moment la répétition, ne fût œuvre réactionnaire. Et M. Donnay affirma :

"Mais oui ! N’avons-nous pas conclu à l’impuissance des hommes qui s’imaginent pouvoir créer une société collectiviste, en l’état actuel des esprits ? Et n’avons-nous pas démontré, par le dénouement de La Clairière, que ces novateurs sont des êtres décevants comme les autres ?"

La fraternité des hommes, pensait-il [Donnay], n’est décidément pas pour demain » [22].

L’ambiguïté de la conclusion permet donc deux interprétations. Pour simplifier, disons que les critiques « conservateurs » y voient une œuvre qui prône le communisme et dont il faut combattre l’idéologie dangereuse, tandis que les critiques « progressistes » regrettent l’attitude jugée réactionnaire des auteurs !

Très révélateur est l’article de Félix Duquesnel [23], personnage visiblement très hostile à toute idée de critique sociale. Je passe sur les critiques qu’il adresse à la forme de la pièce [24]. Pour lui, il s’agit d’une « pièce sociale » qui tourne en « satire » et qui atteint avec le dernier acte des sommets de comique, parfois malgré les intentions des auteurs. Le critique soulève d’ailleurs avec jubilation que les auteurs détruisent eux-mêmes les thèses qu’ils voulaient défendre :

« Le plus amusant de l’aventure, c’est qu’on dirait que les auteurs ont conclu contre eux-mêmes. Après être partis en guerre, courant sus à la démolition du pauvre édifice social, ils finissent par remiser pelle et pioche, parce que la bâtisse lézardée résiste, quand même, et qu’ils sentent bien qu’à sa place ils n’ont rien à mettre, qu’un misérable appentis ouvert à tous les vents ».

La position de Duquesnel est explicite : si personne n’apporte le remède au mal social, c’est qu’il est inutile de le chercher - « Parbleu, nous le savons bien, cela tient peut-être à ce que le remède n’existe pas ». Et, Duquesnel, qui n’aime pas que l’on critique l’ordre social qui le fait vivre, prend donc bien soin de souligner l’échec de l’entreprise décrite sur scène, en affirmant l’impossibilité des théories présentées :

« la leçon qui, fatalement, se tire de l’aventure, c’est que voilà bien des théories, en pure perte, puisqu’elles s’effritent dans la pratique ».

Le critique ne ménage pas ses efforts et utilise toutes les ressources stylistiques à sa disposition pour dénigrer les personnages de la pièce porteurs des idées communistes et anarchistes, à commencer par « le tailleur Rouffieu, utopiste convaincu qui a la langue bien pendue et débite les maximes et théories, comme ferait un distributeur automatique ». Le critique part en guerre contre ces incapables, « fantoches répugnants », qui vont faire se dissoudre la colonie « dans le déchaînement des instincts mauvais, sous les attaques de la bête humaine » :

« Il faut les voir à l’œuvre ces assoiffés d’égalité, pour qui l’égalité consiste à n’avoir personne au-dessus d’eux. Ces travailleurs, qui ne travaillent guère ; les peintres, qui donnent un coup de pinceau entre deux refrains, et les cordonniers qui font plus de discours, que de chaussures ».

Dans son ardeur à dénigrer les personnages et les idées développées dans la pièce, Duquesnel ne saisit pas, en tout cas, l’aspect expérimental de la pièce. Et c’est avec une jouissance à peine contenue qu’il annonce, en épilogue, l’avenir des personnages utopistes :

« ils rentrerons dans la régularité de la vie sociale, ainsi que firent jadis les icariens, les phalanstériens, les saint-simoniens et tant d’autres, qui tentèrent l’aventure utopiste de la revendication, et devinrent par la suite des financiers, des médecins, des avocats, des magistrats, des commerçants, etc., etc., tant il est vrai que "ceci" conduit presque fatalement à "cela", et que la grande panacée universelle qui doit guérir le mal social est encore à trouver ».

Un pléonasme n’est pas de trop (la « panacée universelle ») pour exprimer le soulagement que tout rentre dans l’ordre !

Émile de Saint-Auban [25], moins hargneux que Duquesnel, a cependant beaucoup à redire sur le sujet de la pièce. Le critique, qui a jadis défendu Jean Grave en cour d’Assises, ne trouve pas ce qu’il était venu chercher dans la pièce : une illustration de ce que pourrait être une société anarchiste. Il entend bien, dans La Clairière, la « chanson de l’anarchie », qui résonne chez les deux auteurs pourtant différents. Mais pour le critique, l’Anarchie est une illusion : elle prophétise le paradis terrestre. Il y voit

« la brutalité pensante, la violence intellectuelle, qui tranchent tous les nœuds gordiens, suppriment tous les problèmes, coupent toutes les amarres pour lancer le navire sur les océans inconnus, qui ne parlent plus politique, suppriment la politique, ne discutent ni les lois ni l’État, abrogent l’État et les lois, qui, s’ils triomphaient, bifferaient dans le cerveau un longue série d’images et purgeraient le dictionnaire d’une infinité de mots. [...] » [26]

Ainsi, si l’entreprise des deux auteurs reste louable, et s’ils abordent ici le problème de l’après avec honnêteté, il demeure que le spectateur ne voit pas à quoi peut ressembler la société promise par les anarchistes, et la pièce échoue à illustrer l’utopie anarchiste.

À gauche, les critiques se fondent sur d’autres bases, mais toujours en fonction de l’aspect utopique ou non de l’expérience. Cette fois-ci, la pièce sera jugée, toujours en raison de sa conclusion, estimée trop peu révolutionnaire.

Selon le critique Pierre Denis [27], les auteurs développent une thèse réactionnaire : même s’il entre dans leur démarche beaucoup de compréhension et de sympathie, il demeure qu’ils se moquent des utopies socialistes, qu’ils ne les prennent pas au sérieux : c’est « une utopie rendue volontairement invraisemblable » qu’ils mettent en scène. Et le critique de regretter cette distance en rappelant que les utopies existent bel et bien dans la réalité, et qu’on aurait tort de crier trop vite à leur impossibilité :

« Cette utopie, dont MM. Descaves et Donnay veulent démontrer l’impossibilité de réalisation, a été réalisée pourtant par défunt Godin-Lemaire dans le familistère de Guise, qu’il sut rendre prospère, et qui, pour cette raison, ne pouvait être mis à la scène, car, de même que les peuples et les ménages heureux n’ont pas d’histoire, les organisations sociales parfaites n’offrent pas de thèmes à péripéties émouvantes aux dramaturges qui trouveraient trop fade, sans doute, avec raison, de montrer au public le tableau de gens vivants dans la sereine tranquillité des désirs satisfaits et de la pratique des vertus » [28].

Ainsi les auteurs se trompent-ils si ils croient avoir ici posé la question sociale : ils n’ont fait que prouver leur ignorance de la question. La tentative de solution communiste inventée par M. Descaves est d’une lamentable puérilité : seuls les vaudevillistes caricaturant les systèmessocialistes pouvaient imaginer de telles idées paradoxalement ridicules, et le critique donne l’exemple de ces « types classiques pour les vaudevillistes des ouvriers qui ne travaillent pas, qui chantent et blaguent, de l’ouvrier pochard, du paysan rapace rapinant sur les produits de la ferme qu’il va vendre au marché, et des mégères bavardes, acariâtres et médisantes » [29]. Un autre critique conclut dans le même sens que « cette pièce, où quelques illuminés du poulailler ont cru voir des théories anarcho-révolutionnaires, semble condamner le communisme ou du moins en montrer les impedimenta. Elle a néanmoins fait vibrer les spectateurs [...] » [30].

Henry Fèvre [31] se montre, lui, plus élogieux, en voyant dans la colonie de La Clairière « une sorte de petit phalanstère cordial », un « communisme fraternel et bénévole » qui annoncent des expériences à venir :

« C’est une expérience faite en petit, et comme dans un nid d’oiseau, des grandes sociétés communistes de l’avenir qui seront assurément, si jamais elles existent [...] autrement savantes, renseignées, compliquées ».

Ce qu’il critique, c’est « l’idéalisme ingénu du programme » et il rappelle que les deux auteurs ont été inspirés par des essais de phalanstères socialistes tentés dans le cours du siècle en Amérique et en France, dont certains ont réussi avant de se dissoudre, comme dans la « Clairière », « sous le heurt des passions et des intérêts individuels ». Henry Fèvre relève pour finir l’ambiguïté de la conclusion qui permet à chacun de conforter ses positions :

« Quant aux conclusions, chacun reste libre de persévérer dans les siennes, le pessimiste ravi en sa méchanceté de pessimiste de cette petite faillite de fraternité, selon lui inévitable ; l’optimiste, avec son bon caractère d’accoutumé, enchanté déjà de ce que cet essai ait pu se faire et réussir, au moins quelque temps, dans la vie, et tout à fait, au théâtre, et réconforté, quant au reste, par les généreuses et charitables espérances du cinquième acte. De sorte que tout le monde y trouve son compte, mais nous surtout qui voyons de préférence dans les pièces de théâtre, le côté littéraire ».

Pour finir, il est instructif de parcourir quelques critiques de mars 1909, au moment où la pièce est jouée de nouveau, au théâtre d’Art. Des changements ont été effectués : le 3e acte se déroule à La Clairière, ce qui donne davantage d’unité d’action. Mais surtout, les auteurs ont supprimé le cinquième acte (uniquement constitué de dialogues), les propos qui y étaient tenus ont été distillés dans l’ensemble de la pièce. Or ce dernier acte était une sorte d’épilogue, et le supprimer modifie considérablement la portée idéologique de la pièce.

Dans un article paru en première page de Comœdia, Léon Blum se réjouit que la pièce n’ait pas vieilli. Il signale les remaniements opérés qui, selon lui, conservent la ligne essentielle de la pièce.

En ce qui concerne le 3e acte, Blum remarque que les auteurs insistent davantage sur l’idylle entre Collonges et Hélène, ce qui permet de mieux préparer la scène finale de la délation d’Adèle ; en revanche, les auteurs donnent ainsi une plus grande importance au

drame sentimental qui pèse peut-être trop lourd dans l’équilibre de l’œuvre. L’histoire d’amour risque de paraître remplacer le sujet, « qui est de rendre sensible, de matérialiser la naissance, le développement illusoire, puis l’avortement final d’une idée ». Quant à la suppression du 5e acte, elle a pour conséquence de faire disparaître la scène où Rouffieu et Collonges concluent que du bien sortirait de l’expérience avortée – scène qui atténuait ce qu’il y a de triste et de désolant dans le dénouement de la pièce. Or, comme le note Léon Blum, ces répliques placées à la fin de l’œuvre « précisaient aussi, si je puis dire, la position des auteurs vis-à-vis de leurs personnages et de leur thèse ; elles empêchaient que, de l’échec d’une œuvre entreprise dans des conditions spéciales et défavorables, on pût tirer argument contre les idées et les doctrines dont elle s’inspirait ». Léon Blum tente de sauver la conclusion optimiste de la pièce, mais il est obligé de se référer à la première version de 1900 :

« Par quelle chimère pouvait-on concevoir la durée de cette enclave communiste, bornée de toutes parts par la société ennemie, ne profitant pas de ses avantages et soumises à toutes ses obligations ? Elle devait disparaître. [...] ce dénouement ne prouve rien au delà du fait même, n’autorise aucun jugement, aucune conclusion d’ordre général. MM. Donnay et Descaves avaient pris soin autrefois de le préciser, et la précision n’était pas superflue » [32].

En effet, les efforts de Léon Blum pour ne pas conclure d’une façon pessimiste sont vains : la pièce apparaît bien comme modifiée, dans un sens qui laisse moins de liberté d’interprétation que la première version. Comme le remarque Adolphe Brisson :

« Dans leur version primitive, les auteurs laissaient la porte entre-ouverte à l’espoir ; ils plaidaient, en quelque sorte, les circonstances atténuantes et semblaient admettre qu’une "Clairière" fondée sur des bases plus rationnelles, dans l’avenir, aurait la possibilité de réussir. L’optimisme de ces considérations finales semait le doute dans l’esprit du spectateur. MM. Donnay et Descaves les ont supprimées. Maintenant leur conclusion est nette. L’équivoque a disparu. C’est la condamnation, l’effondrement de l’"expérience". C’est l’échec radical, c’est la faillite. Telle est du moins la leçon que le public retirera de l’ouvrage » [33].

Tous les critiques hésitent en fait dans le choix des mots pour qualifier ce qui se passe à la Clairière. La communauté est considérée comme une expérience sociale, une œuvre sociale, un essai de collectivisme, un phalanstère, une « expérience faite en petit » des grandes sociétés communistes, enclave, un essai de socialisme pratique - ou bien comme une utopie : « rêve anarchiste », utopie socialiste. La question demeure ouverte : peut-on qualifier l’expérience menée d’utopie ?

C’est Léon Blum qui nous semble le mieux résumer l’esprit de la pièce, lorsqu’il écrit que Rouffieu s’est installé dans la forêt « pour donner la preuve et l’exemple que la société communiste n’est pas une fiction absurde ou une utopie, mais qu’elle est réalisable, viable, productrice de prospérité matérielle et de bonheur » [34].

Réponse des utopistes : « notre échec ne prouverait rien »

La question de la définition de l’expérience tentée est d’ailleurs soulevée au sein même de la pièce. Au premier acte, la discussion est lancée, entre le père du docteur Alleyras, sceptique, et Rouffieu, qui soutient la validité de l’entreprise :

« Il ne s’agit pas, monsieur Alleyras, d’un phalanstère au sens fouriériste du mot, car nous songeons bien moins à réconcilier l’homme avec Dieu, qu’avec la vie et avec lui-même.

 C’est bien pour ça que votre projet n’a pas d’avenir : votre idéal est de ce monde.

 Et de quel monde voulez-vous donc qu’il soit, sinon de celui dans lequel nous avons été jetés par surprise ? » [35]

Et si finalement la pratique se révèle un échec, il reste difficile de remettre en question les principes qui ont guidé sa réalisation. Comment oublier Collonges, disant à Hélène peu après son arrivée :

« C’est comme moi : j’ai appris ce que c’était que la Liberté, L’Égalité, la Fraternité sans les avoir jamais vues autrement qu’inscrites sur la façade des monuments publics, et je ne suis pas le seul pour lequel ces trois beaux sentiments ne représentent que trois grands mots et des lettres noires hautes comme ça » [36].

L’utopie consiste ici à vouloir redonner un sens aux mots inscrits sur la pierre des bâtiments, donner chair à des concepts, incarner les « lettres noires hautes comme ça ». Et nous en revenons toujours au cinquième acte, qui sera supprimé dans la seconde version. C’est dans cet acte que Collonges dit à Rouffieu, qui voit le rêve de sa vie sur le point de s’écrouler :

« Quand même tes craintes se vérifieraient, notre échec ne prouverait rien. Il y en aura encore de glorieux et d’utiles. Est-ce que leurs annales, dont ils sont si fiers, ne mentionnent que des victoires ? Nos défaites à nous ont aussi leur grandeur et leur héroïsme. Rien n’est perdu parce que nous disparaissons ; les belles causes comme la nôtre sont des arbres secoués dont les feuilles bruissent, jaunissent et tombent ; mais qu’importe s’il en pousse d’autres pour donner encore à l’humanité un peu de fraîcheur et d’ombrage ? » [37]

L’habileté des auteurs consiste à avoir placé ces paroles d’espoir dans la bouche du personnage le plus sceptique de la pièce. En réactivant la métaphore de la Clairière (« clairière dans la forêt des lois, des conventions et des servitudes » [38]), en y introduisant l’isotopie du temps qui passe et des saisons, les auteurs indiquent que l’expérience menée n’a rien d’une utopie, justement en ce qu’elle est aussi soumise, comme toute expérience réelle, à la loi de l’histoire : ses arbres sont « secoués » par le passage du temps et leurs feuilles « bruissent, jaunissent et tombent », mais peut-être laisseront-ils place à un autre printemps ? C’est en tout cas la conclusion qui figure dans la présentation du programme officiel du théâtre d’Art (saison 1899-1900) : « [...] chacun fait son examen de conscience, se reprochant ce qui a pu nuire au succès de cet essai de collectivisme qui a si mal réussi, mais dit Collonges, les essais passent, mais les idées restent et impriment dans l’âme du peuple une image qui portera ses fruits ». On trouve la même analyse dans le compte-rendu de la pièce par C. Révil [39] :

« [...] ainsi finit cette œuvre sociale qui aboutit à une dislocation, mais le principe et le germe sont semés, l’idée et la conception ont vu le jour, l’image en restera, et le rideau tombe avec l’espérance qu’un jour la Société tirera son ère de cet exemple social ».

Il y avait en outre une autre façon d’aborder la pièce, qu’aucun critique n’a tentée (sauf peut-être Léon Blum, qui s’en approche). Car La Clairière, c’est aussi le titre de la pièce, et une mise en abyme permet de faire le lien entre le théâtre et la vie réelle : invité à entrer dans la pièce, le spectateur est également invité à tenter l’expérience utopique.

En effet, la pièce se veut elle aussi acte de propagande par l’exemple. Lorsque Collonges parle des livres disponibles à la bibliothèque de La Clairière, il se plaint que tous ne parlent que de la misère, de la souffrance et de l’inégalité, sans qu’aucun ne fournisse les moyens pratiques pour y remédier. Ceux qui ont écrit les livres sont partis d’une idée fausse en croyant les hommes meilleurs.

« Et puis il n’ont pas tenu compte qu’il y aurait des hommes et des femmes dans la société nouvelle qu’ils rêvent, comme il y en a dans celle qu’ils veulent détruire et, qu’entre ces hommes et ces femmes, il y aurait l’amour, l’amour source de troubles, de discordes, de jalousie, de haines... enfin l’amour ! c’est tout dire » [40].

Le livre que Collonges aurait aimé trouvé dans la bibliothèque, cherchant un remède au mal social sans cacher qu’il n’existe pas de panacée, c’est évidemment la pièce de Descaves et Donnay.

En même temps, les deux auteurs donnent au sein même du texte théâtral une sorte de mode d’emploi pour le spectateur. Celui-ci se trouve en effet placé dans une position inconfortable : il est finalement dans la même situation que le mécène philanthrope, qui – pour se divertir - paie pour voir si l’expérience va être concluante ou non. Le risque est de retrouver la même curiosité et la même distance empreinte de détachement chez le spectateur, ayant acheté un billet pour le théâtre et restant confiné dans son rôle de spectateur. Son rôle de témoin passif et extérieur l’amène à assister à l’échec de l’expérience. Cet échec était-il inévitable ? Comme le remarque le personnage du docteur : comment savoir ? La position de spectateur ne permet pas de juger : si l’expérience échoue, on pourra toujours penser qu’avec notre participation, il en eût été autrement :

« Notre rôle de témoin, même bienveillant, est commode et vilain. Si ces gens-là échouent dans leur entreprise, il ne nous est pas permis de la critiquer, car sa réussite ne dépend peut-être que de notre concours » [41].

La position de témoin passif est indéfendable, et c’est pourquoi le docteur décide de partir vivre à la Clairière, « en apprentissage » [42]. C’est finalement à ceci que la pièce convie les spectateurs, à un apprentissage, mais un apprentissage qu’il convient de faire nous-mêmes, sans nous contenter d’être assis dans un fauteuil, même un fauteuil de théâtre. Les personnages sont là pour se graver dans notre mémoire à l’instar d’exemples (non au sens de : « modèles », mais à celui de : « cas ») qui n’ont d’autre rôle que d’être incitatifs. Comme le dit encore Collonges :

« Ne nous plaignons pas d’attirer l’attention sur nous. Si l’on nous persécute, c’est que nous existons. Exister, graver des faits dans la mémoire des hommes, à côté des systèmes et des formules qu’ils ressassent, tout est là » [43].

Léon Blum insiste sur ce passage dans son compte-rendu (se référant, encore, à la première version) :

« Et il est vrai, comme le disait Collonges dans la scène supprimée, qu’aucun système social, quel qu’il soit, ne supporte une application partielle, et qu’ainsi l’échec d’une tentative isolée ne permet pas de conclure légitimement contre la possibilité d’une réalisation d’ensemble. Il est vrai qu’en transformant le mécanisme de la société actuelle, on ne transformera pas du même coup les instincts, les habitudes, les besoins qu’elle a créés ou développés, et qu’ainsi les contradictions chaotiques où se heurtera d’abord tout état nouveau ne permettent pas de conclure contre la vertu de l’organisation définitive » [44].

En effet, les auteurs insistent bien – dans les dialogues du cinquième acte - sur la qualité de l’utopie et non le bilan objectif de l’expérience. C’est le geste initial de la rupture qui importe, bien plus que l’échec ou la réussite de l’expérience – façon de laisser entendre que, dans la société actuelle, toute expérience de ce type est forcément éphémère – voire que toute utopie se doit d’être, par essence, toujours recommencée.

Par le théâtre, Lucien Descaves et Maurice Donnay ont donc donné à voir une forme d’organisation communiste-anarchiste, la faisant vivre (et dépérir) sous les yeux des spectateurs. Faisant un pas de plus vers l’utopie, Émile Pouget et Émile Pataud présentent, dans Comment nous ferons la révolution, une uchronie.

Caroline GRANIER

"Nous sommes des briseurs de formules". Les écrivains anarchistes en France à la fin du dix-neuvième siècle. Thèse de doctorat de l’Université Paris 8. 6 décembre 2003.